dimanche 31 juillet 2011

Fantasia 2011: critique de STAKE LAND. On THE ROAD again (I just can't wait to go back on THE ROAD again)

Au festival Fantasia en 2007, ma grande découverte avait été le film d'horreur au micro- budget Mulberry street. D'une efficacité désarmante, le réalisateur Jim Mickle et son scénariste Nick Damici (aussi comédien principal dans le film) avaient intégré un principe fondamental de l'horreur, trop souvent laissé de côté: plus les personnages seront riches et attachants, plus les mécanismes de la peur fonctionneront. Mulberry Street nous montrait les locataires d'un immeuble délabré résister à une attaque de créatures, tout simplement. Une attention particulière était attribuée aux interactions entre personnages et à l'immeuble: le boxeur patibulaire, le travesti au grand coeur, les vieux grincheux. Les créatures étaient des espèces de rats-garous mais au final, elles auraient pu être des zombies ou des vampires et ça n'aurait strictement rien changé à la qualité du film.
J'ai attendu patiemment le retour de Damici et Mickle. Depuis 2006, date de sortie de leur premier, deux événements de taille se sont produit. Le prix Pulitzer pour The Road, le chef-d'oeuvre crépusculaire de Cormac McCarthy  et le succès grandissant de la série de comics The Walking dead

Le genre du survival apocalyptique devra rendre des comptes à ses deux là pour longtemps. Ils ont tout simplement porté aux nues les standards du sous-genre. Allez savoir si Mickle et Damici étaient conscients de la chose ou s'ils ont simplement saisi l'air du temps. Reste que leur deuxième film est une contribution de taille. 
Une invasion de vampire a ravagé le monde. Des poignées de survivants errent ici et là, à la recherche de communautés bordant les routes. Mister, tueur de vampire hors de pair, prend sous son aile un jeune homme qui a perdu sa famille dans une attaque. Il lui apprendra comment survivre, stoïquement mais surement. Or, les vampires sont loin d'être la seule menace: une groupe de fanatiques religieux  pro-vampire, convaincus d'être les agents du Jugement dernier, sont beaucoup plus dangereux. Des rumeurs de cannibales, également...
Stake land pourrait être la suite directe de Mulberry Street. Après tout, les vampires n'ont rien à voir avec les suceurs de sang éthérés de la dernière décennie. Comme les "hommes rats" de leur premier film, ce sont des bêtes sauvages sans aucune intelligence, purement et simplement. Dans le rôle de Mister, Nick Damici pourrait même être le même personnage qu'il jouait dans le premier film. En outre, Stake land fonctionne exactement comme une version élargie de Mulberry Street oû on verrait les effets à long terme de l'invasion sur le reste du monde. 
 
Au demeurant, bien qu'ils soient assez effrayants dans leur sauvagerie, les vampires sont ici accessoires. Comme dans les meilleurs films du genre, l'homme reste un loup pour l'homme est c'est à ce niveau que Stake land excelle le plus. Il trouve également au le moyen de commenter le fanatisme religieux. L'omniprésence des iconographies chrétiennes prend des allures inquiétantes de fétiches.
Le tout est également imprégné d'une sensibilité très deep south; le blues, le country, la poussière, la route, les villages de survivants presque western. Les vampires sont plus sauvages que ceux de Near Dark et n'ont rien à voir avec ceux de True Blood. Même la narration du jeune homme, très Malickienne par moment, renchérit ce mood.
Impossible forcément de ne pas penser à The Road. La saleté, la faim, la nostalgie la relation entre la figure paternelle et le fils. La cruauté des hommes aussi. Stake land est The Road avec de l'action. Impossible également de savoir si Mickle a voulu consciemment utiliser cette approche. Reste qu'elle fonctionne à plein régime. Quelques notes mélancoliques de pianos et de violons donnent à l'ensemble le bon ton mélodramatique.
Comme Walking dead, les relations entre les personnages et leurs déplacements sont le vrai moteur de l'histoire. Nous ne sommes pas simplement dans survival de la route. On ne lésine pas sur les scènes de suspense et de confrontations pour autant.

Ces références empruntées n'empêchent pas Stake land d'avoir ses propres petites trouvailles. Dans ce monde, il n'y a pas de monnaie plus valable que des canines de vampire. Elles prouvent sans équivoque la valeur du survivant. Il faut aussi être inventif et aguerri pour dégommer du vampire: courvrir ses vitres d'automobile avec des clôtures grillagées et savoir mener du pieu à deux. En tueur de vampire émérite, Damici est magnifique et possède un je ne sais quoi du jeu fauve d'Harvey Keitel.

Dans tous les cas, Stake land confirme le talent et la débrouillardise du duo Mickle-Damici. Le cinéma d'horreur indépendant n'a pas dit son dernier mot, quitte à se répéter avec classe.

Fantasia 2011: critique de KLOVN:the movie. Quelque chose qui fait rire au royaume du Danemark

 Quelques minutes après la finale de Klovn: the movie, j'étais dans un tel état de grâce que  je lisais tout ce que j'étais capable de trouver sur la télésérie danoise dont le film est adapté. Vous vous souvenez ce qui c'est passé à la sortie de Shaun of the dead? Un engouement instantané pour Spaced, la série des mêmes créateurs; le monde en demandait encore. Il y a fort à parier  qu'un phénomène similaire se produira avec Klovn. Pour ma part, je ne goutterai au repos que lorsque j'aurais vu les les six saisons de la série, les 60 épisodes de 25 minutes au complet. Si comme moi vous vivez dans l'attente cruelle et continuelle de  Curb your enthusiam, -Klovn  ne peut échapper à la comparaison-, le film va pincer vos cordes sensibles. En fait, Klovn se situe parfaitement à mi-chemin entre deux séries télés élevant l'humour jusqu'aux hautes sphères de la philosophie, Curb your enthusiasm et It's always sunny in Philadelphia.

Du premier, Klovn possède le mordant de l'humour inconfortable carburant aux maladresses sociales. Il est traversé de ce genre de scènes que le spectateur regardera la tête de côté, les mains dans le visage et le regard  entre les doigts. Les silences trop longs, les humiliations et les moments d'interactions sociales qui vont forcément foirer sont au rendez vous. Y'a de la tartufferie à revendre dans Klovn. Forcément, on pense aussi à The Office. Il emprunte également la même approche au niveau de la réalisation et des dialogues, celle de chroniques du quotidien de personnages se jouant eux-même. 
À l'instar de It's always in PhiladelphiaKlvon peut être aussi épique dans sa vulgarité, irrévérencieux et outrancier. Les personnages sont moralement déficients, complètement centrés sur eux-même et bien qu'ils soient inséparables, ils sont nuisibles l'un pour l'autre. 

Mais Klovn n'est pas qu'un simple amalgame. S'il balance tour à tour irrévérence et comédie de situation, il sait aussi se faire très subtil par moment. Je résume et vous donne un exemple...

Frank et Casper sont deux potes de longue route. Tous les deux, ils sont du ÇA ambulants: narcissiques, peureux, juvéniles, libidineux et parfois vaguement stupides. Ils ont l'intention de faire une longue excursion en canoë qui les mèneront jusqu'à un somptueux bordel oû il s'en donneront à coeur joie. Un petit problème: ils ont des copines. Celle de Frank est par ailleurs enceinte et elle doute fort de ses capacités de père. Pour prouver à sa copine qu'elle se trompe, il a la bonne idée de quitter quand même en compagnie de Bo, son jeune neveu de 13 ans. 
Au tout début du film, un indice précieux sur son sens profond nous est fourni. Nos deux personnages font partie d'un club de lecture oû le dernier thème est Joseph Conrad. Conrad est l'auteur du roman Heart of Darkness, adapté au cinéma par Coppola qui en a fait Apocalypse Now. Klovn emprunte la structure et les thèmes du récit de Conrad: nos deux protagonistes devont traverser une rivière pour se rendre au bordel oû un "village" de femmes exotiques les attendent. Mais le maître des lieux les attend de pied ferme. Les expériences vécues tout au long du parcours changeront Frank et Casper à jamais. Ils plongeront dans les recoins les plus reculés du coeur de l'homme, là oû on doit apprendre à se tenir debout, ne serait-ce que pour pisser dans les bois.

Des lecons de vie bouleversantes nous sont fournies: il faut dire à sa copine qu'on l'aime avec des "perles" mais en évitant ses yeux. Le gras de bide peut donner l'impression que le pénis est plus petit, surtout chez les adolescents. C'est d'ailleurs préférable de pisser assis quand on a un micro-pénis. On ne peut manger toutes les crêpes d'une femme sans participer minimalement à un ménage à trois. On peut flirter avec des hommes pour obtenir quelque chose d'eux sans être homosexuel. Aucun gag de pédophilie n'est de mauvais goût entre hommes consentants. 


Klovn est le digne héritier de Molière. C'est une exploration des vicissitudes de l'homme et de son obsession pour les blagues de pénis.

samedi 30 juillet 2011

Fantasia 2011: critique de UNDERWATER LOVE. Les clapotis du désir font une bien jolie musique

Vous savez ce qui manquait au Fabuleux destin d'Amélie Poulain? Il lui manquait un homme tortue qui se fait bouffer sa grosse bitte verte. Rien que ça. Si Jeunet avait compris ça, son film aurait sauvé le monde du suicide, de l'ennui et de l'impuissance.

UNDERWATER LOVE est un petit fruit gorgé de sucre et modifié génétiquement. Avec du petit jus qui pète dans ta yeule. Il fait aussi couler le petit jus dans tes culottes et ça fait sourire. Tee hee!

L'histoire: Asuka travaille dans une poissonnerie de campagne et se prépare à épouser son patron.  Elle est heureuse , si ce n'est que son futur époux est un dégoutant éjaculateur précoce. Elle est souriante et aime danser. 
Jusqu'au jour oû elle rencontre un kappa, ces yokais (créature des bois du folklore nippon) mi homme mi tortue. Et pas n'importe lequel: ce kappa est la réincarnation d'un amour de jeunesse perdu dans une noyade, Aoki (joué par un acteur dans un costume cheap)
À propos des Kappas: d'ordre général, les Kappas sont un peu libidineux, ils aiment reluquer les femmes et parfois même les violer. Ils peuvent être amicaux mais certains entrainent les gens dans la noyade. Ils raffolent des concombres, aiment le sumo, ils sentent le poisson et leur tête surmontée d'une cavité doit toujours être remplie d'eau, sinon, ils s'immobilisent.
 Ils sont aussi très poli: pour se débarrasser d'un kappa, il suffit de le saluer en se penchant. L'eau de son crane se videra. Ils aiment parfois manger le shirikodama des gens, une boule de chair qu'on peut extraire de l'anus, c'est bien connu. Vous en verrez une dans le film, c'est promis.

Mais Aoki est un kappa amoureux. Il est sans malice, n'a rien à foutre des perles anales, il aime manger des concombres et se faire sucer la bitte (qui ressemble d'ailleurs à un gros pickle), par la jolie pècheuse potelée du coin. Mais dans son coeur de tortue puante, ce qu'il veut par dessus tout, c'est aimer Aoki.

Underwater love est un film kappa, un hybride, à cheval entre deux mondes. C'est un pinku eiga (film folichon) expérimental doublé d'une comédie musicale...avec une trame sonore de Stéréo total en japonais et la photographie toujours sublime de Christopher Doyle. Filmé en 5 jours en une seule prise avec des chorégraphies improvisées et deux scènes de cul assez mémorables, c'est le film qu'il faut voir avec son conjoint pour lui faire comprendre que l'amour n'a pas plus de frontières que les orifices.
 Pendant le visionnement, une jolie geekette complètement gelée derrière moi disait continuellement "kappa kappa" pendant les scènes de cul. Je vous jure. 
Sur IMDB, les mots clés concernant le film sont Large penis, kinky sex, sodomy, animal penis, cucumber et, comme si ce n'était pas suffisant, see more. Quel film peut s'enorgueillir d'avoir tout ces libellés? Certainement pas Le fabuleux destin d'Amélie Poulain. Je payerais cher pour regarder Audrey Tautou se rentrer un shirikodama dans le cul

Fantasia 2011: critique de TRUE LEGEND et 13 ASSASSINS: Le Wuxia pian du vieux maître VS le Chambara de l'enfant maudit

Une légende chinoise aux épanchements mélodramatiques revue et corrigée à grands coups de poing par Yuen Woo-ping.  Le crépuscule des samouraïs revu et corrigé par Miike qui nous peint enfin un authentique chambara.  Vus un après l'autre, dans un état de ferveur. La juxtaposition était appropriée et étourdissante: si les films sont drastiquement différents dans leur approche, leur dessein est sensiblement le même: montrer comment la légende est le vecteur des changements de l'histoire .
Les héros sont tragiques. Le méchants sont d'une cruauté inouïe. Les femmes sont laissés derrière. Les combats sont d'une violence démesurée mais ils sont aussi traversés de poésie. La même recette, deux sauces: de l'aigre-douce dans ton coeur  VS et du Wasabi dans ton âme
Vous êtes familiers avec Yuen Woo-ping? Même si c'est le cas, faisons un petit exercice vous voulez bien? Sans être exhaustif, considérons l'importance de ce que l'homme a donné au cinéma depuis quelques décennies. 
Pour une poignée d'occidentaux férus de films de kung-fu, Yuen Woo-Ping est celui à qui l'on doit la véritable introduction des arts martiaux chinois dans la cinématographie américaine. La découverte de Jet Li, de Jackie Chan, du Kung-fu drunken Style, les chorégraphies des Matrix et des Kill Bill; le vieux maitre a exalté plus que quiconque  les canons d'une mythologie typiquement chinoise, pour le grand bonheur des néophytes et des exégètes. Avec le succès planétaire de Crouching Tiger, Hidden Dragon , il a également contribué à la  prolifération subséquente des Wuxia pians, les films de capes et d'épée chinois où les combats sont des ballets aériens. Même Kung-fu Panda 2 est truffé de référence directes à ses films et son style de chorégraphies (ne riez pas: Kung-fu Panda 2 est un hommage vibrant et hautement intelligent à Sammo Hung et aux premières réalisations de Woo-Ping, The magnificent butcher en particulier). 
Même les cinéphiles les plus curieux ont souvent commencé avec ses films pour ensuite se familiariser à rebours avec les grands classiques de la Shaw Brothers , allant de Liu Chia Liang à Chang CheH pour ensuite découvrir le souverain du genre, King Hu. Avant lui, les occidentaux en général ne pouvaient à peine faire la différence entre le karaté et le kung-fu, Shaolin et le Mont Wutang et la Chine était régulièrement envahis par des ninjas. Allez voir le dvd français de Legend of the drunken master avec Jackie Chan juste pour rire: on a traduit drunken Style pour "le Karaté saoul"! 
Pour tous ses accomplissements, il manquait à Yuen woo-ping son film-somme, un long métrage poussant au paroxysme toutes ses obsession stylistiques, thématiques et même spirituelles. True legend est précisément ça. Il remonte aux sources des mythes fondateurs sans aucun soucis de crédibilité ou de cohésion narrative. Les scènes de combats parlent d'elles mêmes. Elles sont nombreuses, bruyantes, improbables et elles cognent dure, très dure.  Ce sont des surhommes qui se battent ici, des super héros chinois capables de défier les lois de la physique et de faire du breakdance de combat.
Le film nous raconte l'histoire de Beggar So, héros de guerre tragique qui sera happé par la folie et le démon de la bouteille. Créateur du drunken fist, cette forme de combat où les mouvements émulent l'état d'ébriété, on verra ce personnage au cinéma des dizaines de fois, particulièrement dans des comédies.  Le véritable  créateur du drunken fist, bien qu'il soit une forme de combat existante, est nul autre que Woo-Ping. Il est directement responsable des plus belles séquences de combat en état d'ébriété. True legend nous fourni enfin l'origine "complète" de ce touchant personnage, joué à plusieurs reprises par le maitre lui même. 
Dès les premières minutes du film, on se croirait dans une adaptation de bédé américaine. Le film sensiblement une version asiatique de Thor: Beggar Su semble provenir d'un Valhalla chinois traversé de combat exagérément épique et à la limite du surnaturel, où il est le fils favoris. Dans ce rôle ,Man Cheuk Chiu donne la meilleur performance de sa carrière depuis The Blade


Dans True Legend, les hommes côtoient les dieux pour apprendre les secrets du combat. Le légendaire Gordon Liu reprend le rôle classique du vieux sage aux longs sourcils Pai mei et Jay Chou, le Kato de Green Hornet, est le dieu du Wu Shu.  Le frère de Beggar su est le perfide Yuan Li, sorte de  nécromancien possédant les secrets des styles de combat "venimeux". Superbe vilain gavé jusqu’à la moelle de clichés, il porte des costumes mauves (comme tous bon vilains de comic-book), il a la peau livide et elle est greffée d'une armure.
Les geeks  lui trouveront quelques ressemblances avec un des grands vilains  du comic-book, Master Darque, le nécromancien, qui sévissait jadis dans les pages de la compagnie Valiant. 

Yuan Li est ostensiblement le Loki de cet univers: jaloux de son frère et cherchant à se venger de son père adoptif, l'assassin de son vrai père. Dans sa folie meurtrière, il possède quand même un sens tordu de la filiation, comme les meilleurs méchants du genre. Les ressemblances entre Thor et True Legend ne s’arrêtent pas là. Les deux films oscillent entre la fantaisie de comic book et la tragédie Shakespearienne: Le jeu ampoulé des acteurs et leur prononciation modulée du mandarin s'en chargent. Les mythes scandinaves et chinois font assez bon ménage. Le film finlandais Jade Warrior présenté à Fantasia voilà trois ans avait tenté un mariage de fortune en transposant le mythe de la Kalevala dans un wuxia pian classique...et ça fonctionnait.
True legend est un fantasme mythologique pure, entre la tragédie et le mélodrame. Il n'est aucunement question de conférer quelconque crédibilité à l'histoire. Le canevas est vieux comme le monde: trahison du frère usurpant le pouvoir, exil et déchéance du héros, les scènes obligatoires d'entrainement et de découverte spirituelle de même que la vengeance finale. 
Mais ça ne s’arrête pas là. 
Faisant preuve d'une audace peu commune dans le genre, Yuen Woo-ping ne nous permet pas de déterminer si l'histoire se passe à une multitude de niveaux dans la psyché d'alcoolique du personnage (il faut voir ses combats avec le dieu du Wushu sur les flancs d'une statue!) ou s'il est tombé d'un monde parallèle (à la manière de Thor, justement). Un inexplicable jump-cut de plusieurs décennies ajoute à la confusion, pour notre plus grand plaisir. Cepandant, un indice demeure: le plus grand combat que mène Beggar Su est contre lui même. Les art martiaux, plus que jamais chez le vieux maitre,  sont des danses illustrant le combat intérieur.
TRUE LEGEND est parfois larmoyant, déchirant et particulièrement loquace dans la démonstration des prouesses physiques ...et c'est parfait ainsi. Tout est dit dans l'oxymore du titre . 

13 assassins maintenant.


Enfin. 
Enfin, un véritable chambara pour Takashi Miike. Un Miike tout en retenu (!)  qui ne  perd rien de la cruauté et l'humour qui font sa signature.
Enfin. Un chambara qui se permet d'être presque chinois dans son verbiage martial. 
Enfin, un film de guerre asiatique qui m'a autant satisfait dans sa sauvagerie que Bang Rajan
Enfin, le jidaigeki que les maniaques attendaient depuis des lustres. 
Qu'on se le disent. Dans la démonstration des arts martiaux, les Japonais n'ont rien à voir avec les Chinois. Économie de moyens, mouvements brefs et parfaits, tension à couper au Ginsu. Le samouraï et au haïku ce que le guerrier chinois est à la poésie épique. C'est le propre d'un vrai chambara: les combats ne sont jamais au centre de l'histoire. Ils sont d'incisives ponctuations. Admettons le: Vous attendiez un film de samouraï où les combats ont une place prépondérante depuis longtemps non?


Jouons avec les chiffre: Il a beau être un remake du film Eiichi Kudo de 63 portant le même titre,  13 assassins est le versant sombre de 7 samourais et le frère d'arme de 47 ronins, auxquels il fait par ailleurs souvent référence. Même les chiffres des titres se miroitent; le lucky seven et les héros humanistes de Kurosawa en opposition au  13 de malheur des kamikazes assoiffés de justice de Miike. 13 assassins offre une variante du grand classique de Kurosawa en capitalisant volontiers sur des scènes de combat à l'énergie bien contemporaine. Il en devient en quelque sorte l'inversion. Mais il est aussi une relecture de 300 à la manière nipponne. Faites le calcul: 47 X 7 -13= presque 300. ha HA! 



N'ayez crainte: ça fonctionne à merveille. Miike s'était déjà prêté à l’exercice, (de manière beaucoup plus expérimentale), en faisant IZO, une suite informelle et jodorowskienne du classique d'Hideo Gosha TENSHU (cliquer ici pour écouter notre émission sur à ce sujet)
 Si 7 samourais se passait à l'apogée d'une période de guerre, 13 assassins se déroule à la toute fin de leur règne, en temps de paix. Les 7 samourais protègent un village d'une attaque de brigands. Les 13 assassins doivent débarrasser le japon de son plus dangereux tyran.
Dans le rôle du leader du groupe, Koji Yakusho, en voie de devenir le comédien japonais le plus important de sa génération, continue de devenir l'héritier spirituel de Takashi Shimura (faut le voir lui rendre hommage dans Dora heita). S'il est le même personnage, il est cependant une version sombre de Shimada, satisfait de pouvoir enfin mourir au combat. 
 La réponse à Kyuzo, le bretteur virtuose au visage stoïque est Hirayama Kujūro. Deux personnages inoubliables interprétés par deux comédiens (et escrimeur) de grand talent, tout en finesse, en élégance et en furie guerrière.


Dans le rôle du rônin joueur et désabusé, le surprenant Takayuki yamada (qui jouait les trois personnages principaux de Milocrorze:a love story) devient la conscience du groupe. 
On a aussi droit au jeune guerrier voulant se tester au combat, au samouraï bedonnant et jovial et à l'assistant général qui reprend du service. 
Il fallait forcément que le personnage de Kikuchiyo, le fermier courageux et opiniâtre avec une très grosse épée (et comedy relief),  campé avec brio par Toshiro Mifune, ait un remplacement à sa mesure.


C'est chose faite avec Kiha Koyata, interprété par Yūsuke Iseya.


Personnage typiquement Miikéen, Kiha est à la fois un comedy relief et le personnage insaisissable. Hommage évident à l'animalité de Mifune dans le film de Kurosawa, Kiha n'est pas un samouraï; c'est un homme des bois, un chasseur habile qui a lui aussi un tempérament opiniâtre et une...très grosse épée.  Il y a fort à parier que Kiha ne soit pas un être humain: pour ma part, je me plais à croire qu'il est un Tanuki, un esprit animal de la forêt qui a pris forme humaine (les ratons laveurs avec des grosses bittes dans le Pompoko de Miyazaki, pour les non-initiés)
Miike est passé maitre dans l'art d'inventer des personnages qui sont des experts de la cruauté. Il a probablement inventé son plus beau monstre en la personne du sadique souverain Matsudaira Naritsugu . Un enfant de pute comme on en fait plus. Si le vilain de True Legend est admirablement suranné, celui de 13 assassins à des psychopathologies Ô combien modernes.
Déviant et obsédé par la mort, le souverain n'a pas son pareil pour infliger la souffrance. Il est sans aucune morale, complètement insensible et il est au centre des scènes les plus Miikéennes du film (une est particulièrement éprouvante et inoubliable) Vous allez vraiment vouloir voir le salopard souffrir. .

Presque parfait dans son exécution, 13 assassins culmine sur une scène de combat final exemplaire en tout point. Longue de presque 30 minutes, elle aurait fait bander Sun Tzu comme un cheval. Dans un village transformé en machine de guerre, nos treize assassins deviennent des vikings doublés des salopards de Western spaghettis. C'est la fin de Sword of doom d'Okamoto multiplié par 20.


Miike continue de prouver qu'il est une magnifique tache de sang et de  merde en forme de papillon sur la face du soleil levant. Il nous enfin donné le chambara qu'on attendait de lui. 

jeudi 28 juillet 2011

Fantasia 2011, Jour 14: Éloge d'UN GÉNIE, DEUX ASSOCIÉS, UNE CLOCHE. Une arlequinade en guise d'oraison

Le western-spaghetti savait qu'il allait mourir. Il s'y préparait déjà depuis quelque temps. Pistolet rayé en main, de plus en plus recouvert de poussière, il est allé crever dans des décors de plus en plus en plus délabrés, évocation de l'agonie du genre. Dans Keoma de Castellari, c'est dans les magnifiques yeux bleus de Franco Nero qu'on pouvait percevoir la mélancolie de l'inévitable décès. Un dernier magnifique râle.
Juste avant l'ultime souffle, un autre regard bleu, rieur celui là, avait décidé de s'en moquer. Mario Girotti. Terrence Hill. Son nom était Personne. À l'époque, il semblait étrange que le maestro Sergio Leone prête sa voix tonitruante à la comédie Mon nom est Personne. Aujourd’hui, on sait assurément que c'était le champ du cygne dont le genre avait besoin. 
Dans ce film, Personne est l'incarnation même du Western-spag, donnant un second souffle au western classique, incarné par Henry Fonda. Il  sait cependant que sa fin à lui aussi est proche. Il s'appelle Personne parce qu'il  est un bâtard, un fils illégitime et abandonné. Personne ne pouvait sauver le western-spag, mais il pouvait tout au plus lui donner ses dernières lettres de noblesses et sa part de latin. Avec un grand sourire.
Quand le séminal Fistfull of dollars de Sergio Leone sorti en 1964, c'était évident pour tous qu'il était un transposition de fortune du Yojimbo de Kurosawa. Probablement pour cette raison, l'autre géniteur du genre fut laissé  de coté assez rapidement. A fistfull of dollars, c'est aussi et surtout l'Arlequin, serviteur de deux maitres de Goldoni. L'ombre grimaçante de la Commedia d'ellarte était penchée depuis quelques temps sur le Western Spag. Plus que tout autre, c'est Terence Hill qui aura été son Arlequin; joueur de tour, acrobate ,arnaqueur, séducteur, faussement niais et au cœur de la lutte des classes.
C'était un privilège de voir Un génie, deux associés, une cloche dans les conditions offertes par Fantasia hier. 
Elles permettaient d'appréhender pleinement sa richesse. Traversé d'une quantité de teintes jaunâtres, parfois volontaires et parfois fruit de la patine du temps, la poussière semblait dorée et la lumière encore plus...ce qui renchérissait l'impression de voir une histoire provenant d'un monde mythique et fantasmé.


Terence Hill y reprend son archétype de Personne. Cette fois, il est Joe Merci, un peu comme Yojimbo deviendra Sanjuro. C'est le même personnage. Notez son nom, il est important: C'est un remerciement (au genre?) mais cette aussi le mot "mercy" (pitié). Joe n'est pas un tueur. C'est un Trickster, un joueur de tour.
Sa fonction d'Arlequin confère  à Joe une conscience métatextuelle des codes du récit (Arlequin s'adresse souvent à la foule dans la commedia dell'arte). Il porte le costume doré de circonstance (littéralement couvert d'or!) que doit porter tout bon Arlequin. Il va même jusqu'à dire à un vieil indien de quitter à gauche de l'écran parce qu'il représente le passé! Il n'a pas besoin de tirer de son pistolet et quand il le fait, les lois de la physique lui obéissent: Joe Merci a un compère et c'est le réalisateur. Merci connait tellement bien les mécanismes de son monde qu'il est capable d'élaborer les arnaques les plus complexes et de retourner  toutes les situations à son avantage. Après tout, il est l'incarnation d'un genre qui trotte vers ses derniers milles. Il en a vu d'autre et il sait qu'il ne peut pas perdre. Il n'a donc pas besoin de tuer. Il porte une  petite sonnerie à son cou pour se rappeler les différentes étapes à suivre de son plan étourdissant de complexité, huilé au quart de tour.
Attendez...il porte une sonnerie à son cou? C'est lui la cloche du titre?. Mais qui donc est le génie et qui sont les deux associés? Est-il possible que nos héros occupent tour à tour chacune de ses fonctions? 


Si. 
Le titre est un indice.Ça les aminches, on appelle ca une ARLEQUINADE.
 Une arlequinade, c'est une trinité de personnages en interaction étroite avec deux antagonistes. Arlequin, Pierrot et Colombine forment la base. Pantalon et le Clown sont les menaces extérieures(rappelons que Terrence Hill continuera à jouer plus tarddans des arlequinades et que son personnage  prendra le nom de...Trinity!).
-Arlequin=Terrence Hill, Joe Merci
-Pierrot (le lunaire, le distrait, celui qui se fait exploiter par Arlequin)=  Robert Charlebois dans le rôle de Locomotive Bill
-Colombine,(naïve, pure et amoureuse des deux) = Miou miou dans le rôle de Lucie
-Pantalon (le fourbe, l'avare, la cruel, l’alcoolique)= Patrick Mcgoohan en Major Cabot
-Le clown=Piero Vida dans le rôle de Jacky Jolly Roll.

Il est absolument accessoire de comprendre qui manipule qui. Il ne sert à rien de résumer cette histoire. Il est question d'un trio qui veut arnaquer le Major Cabot de 300 000$ et c'est tout ce que vous avez besoin de savoir. C'est une Arlequinade (forcément méta fictionnelle par moment) qui sert à annoncer que le rideau de cette commedia d'ellarte que fut le western spag va bientôt être tiré à jamais. Les italiens vont fermer le grand Théâtre d'Almeria. Le temps de quelques coups de feu, le théâtre populaire et le cinéma de genre se sont rejoint.
 Tout le splastick du monde, tous les gags et les scènes d'actions ne pouvaient étouffer l'oraison joyeuse et assumée qu'est Un génie... beaucoup plus profond qu'il ne veut bien le laisser paraitre, à l'instar du personnage de Joe Merci (Merci pour la ride. Mercy for me!)

Je ne passerai pas sous silence la généreuse présence hier de notre héros national du rock à la fin du visionnement. Tour en tour la cloche, le génie et l'associé, surprenant de désinvolture, Charlebois campe son personnage de métis récalcitrant, locomotive Bill, avec une énergie de...well, de rock star. C'est aussi un plaisir d'entendre son doublage en français "normatif" s'écrouler en roulements de R, typique de notre joual galopant.  Leone lui aura d'ailleurs demander de se restreindre à ce niveau là; Charlebois sonnait bien trop comme un nègre (pas quelque chose qu'on entend à tous les jours hein?) Ironiquement, avec son teint exagérément rouge et ses cheveux frisés, il était probablement difficile pour les italiens de se figurer d'où il venait.


Émouvant moment où notre histoire rejoignait celle d'un genre ne nous appartenant pas. Charlebois ne fut pas laconique avec ses anecdotes.


On apprend que Damiani et Leone ne s'entendait pas particulièrement bien, Leone étant un anarchiste de droite et Damiani un un communiste obsédé par le thème de la lutte des classes. En tant que producteur, il réalisa quand même la scène d'ouverture, inspirée de ses propres films, comme s'il passait le témoin à Damiani au sein de son propre film. Étaient-ils  les deux associés du titre, à leur insu? Forcément, parce que le véritable  génie, c'est Ernesto Gastaldi, scénariste du film (et donc du titre). Morricone serait donc la cloche. On ne dira jamais assez à quel point le grand génie du western spag est autant Gastaldi que Leone. La méta textualité de cette arlequinage est si vertigineuse qu'elle va jusqu'à la conception du film.
Nous apprendrons également que Leone avait initialement approché Charlebois après avoir vu une de ses performances à Cannes. Il voulait lui faire jouer un assassin dans un film qui se serait intitulé What's up with you Humpty Dumpty? Charlebois refusera et se fera contacter plus tard pour jouer dans le film de Damiani. Il passera l'essentiel du tournage chaud comme une botte et gelé comme une balle. On sait maintenant que Leone voulait faire Les Valseuses version western, d'où la présence de Miou Miou (et d'un canadien français qui peut parler anglais pour remplacer Depardieu?)

Charlebois prendra quelques cuites avec Mcgoohan avec lequel il s'entendait très bien (étant le seul à parler l'anglais sur le plateau) qui, en bon irlandais, " déjeunait au gin tonic le matin". Il jouera quelques jours sur le piano de Debussy, jammera chez Morricone et ne se pointera pas pendant une journée de tournage pour cause de gueule de bois, prétextant un congé de Pâque. Ce qui mettra Leone en beau joual vert (J'ai réussi à ploguer cette phrase! Je peux quitter...)
C'est un magnifique cadeau que nous a fait Robert Charlebois et  les gens de Fantasia. 
Le 7ème antiquaire vous en remercie du fond du cœur.




mercredi 27 juillet 2011

Notre émission du 27 juillet: Spécial Fantasia- quelques notions d'horreur folklorique

Par la seule et unique présence de Robin Hardy et Richard Stanley cette année au festival Fantasia, l'événement se trouve en quelque sorte "marquée par la bête". En outre, vous remarquerez qu'une bonne partie de la programmation est traversée de notions d'horreur habitée d'une certaine saveur folklorique
 Le temps d'un bref retour sur les films que nous avons vu là bas récemment, nous parlons cette semaine de ce sous-genre appelé le "folk horror". Terme plus ou moins canonisé par Mark Gatiss dans son documentaire de la BBC "A history of horror", il évoque un certain cinéma anglais friand de paganisme, de rituels sataniques et de chasseur de sorcière qui culminera sur le triomphe de The WICKER MAN. 
Survol des films du genre et de leur importance cruciale. 

lundi 25 juillet 2011

Fantasia 2011, Jour 10: Critique de MONSTER BRAWL: Con (et merveilleux) comme la lune

Il n'y a pas si longtemps que ça, nous vous avions concocté ici même une émission pas piquée des vers sur la vénérable tradition des horror show hosts, ces individus  qui bonimentent des vieux films d'horreur à la télé (cliquer ici pour l'écouter: Notre émission du 27 octobre:Les Horror Show Hosts, une tradition américaine).
Nous y faisions  l'évidente constatation que le monde de la lutte contemporaine doit beaucoup à ces individus. Avec ses managers sinistres et caquetants, ses lutteurs souvent monstrueux et ses costumes flamboyant, la lutte a autant (sinon plus) à voir avec le théâtre athlétique que le sport. Le ring restera à jamais un espace mythologique où sont mises en scène des confrontations légendaires, où sont susurrés  les échos séculaires des batailles de Gilgamesh et Hercules. Y'a du monde bien plus intelligents que moi qui échafaudent des théories sur le sujet dans les internets, vous pouvez me croire. Marc Cassivi entre autre.
 Il fallait bien qu'un jour, quelqu'un prenne l'idée au pied de la lettre.

Fantasme absolu de geek,  Monster Brawl est con et beau comme la lune, cette magnifique lune de carton deux fois trop grosse que l'on voit dans les films de la Universal. Il offre une généreuse dose de ces fantaisies masturbatoires qui traversent les conversations de geeks: qui gagneraient le combat  entre Tarzan et Mowgli, entre King Kong et le Stay Puft marshmallow man,  Inspecteur Gadget  et Robocop, le Blob et Barbapapa? Vous savez, on trouve même un jeu de combat amateur, Terrordrome, où l'on peut mener des batailles à mort avec les grands slashers du cinéma! Oui oui! 

Pour moi, de même qu'une généreuse quantité de mes semblables, ses conversations peuvent prendre des proportions épiques. C'est hautement constructif! Logique que les monstres classiques de la Universal fassent souvent partis de nos élucubration hypothétiques. 
D'accord, ces créatures se sont déjà affrontées mais goddamnit elles ne se sont jamais vraiment cognées dessus à grands coups de savates et ça, tout le monde veut le voir non?
En ce sens, Il est indéniable que le réalisateur canadien Jessy T. Cook est un philosophe geek de la plus haute distinction.
Un ring au centre d'un cimetière maudit avec des vieilles pierres tombales et un lugubre gardien...la totale. Deux commentateurs de lutte, un blasé (David Foley, au sommet de sa forme) l'autre hystérique (Art Hindle, magnifique). Jimmy Hart et son fidèle mégaphone, pour ajouter un monstre classique de plus.
Les grandes créatures de la Universal et quelques unes plus modernes (un zombie et un monstre des marais) vont s'affronter. Comment et pourquoi se retrouveront-ils sur le ring ensemble? On s'en contrefout. Mais attention! Monster Brawl n'est pas un film. C'est un gala de lutte. C'est même la répétition sentencieuse de sa structure formatée qui le rend hilarant et qui le rendra absolument insupportable pour certain.
Vous aurez droit aux statistiques complètes des monstres, à leur origine et leurs attaques de prédilections. Des commentaires animés et hilarants pendant les combats, des cartes de présentations, les monstres qui se font des speachs de confrontation, des combats éliminatoires, des logos et des managers. Il a même deux divisions: Monsters and Undead. Si la sorcière a plus d'un tour dans son sac, le monstre des marais est toxique. Le loup-garou est plus puissant les soirs de pleine lune et la momie peut t'étrangler avec ses bandelettes. Je mouille mes culottes de bonheur. Oh regardez! Le loup Garou hurle à la lune de la troisième corde! Le cyclope tire des rayons avec son œil!! J'ai envie de pleurer.

Monster Brawl est à la fois aussi cheap qu'un film d'Al Adamson et un gala de lutte de sous-sol d'église. Les designs des monstres, kitsch à souhait,  sont particulièrement  réussis (Frankenstein et le Loup-garou sont magnifiques, les interprètes ne donnent pas leur place non plus). Si les combats manquent parfois quelque peu de dynamisme et (ahum) de technique, c'est tout ce qui empêche Monster Brawl de devenir un film hautement culte. Le temps de quelques confrontations, l'esprit  des horror show host vient valser avec  celui des managers de lutte dans un décors en gyproc. Vous ne voulez pas manquez ça.


À ce titre, je suggère aux curieux d'aller lire ici même la critique élogieuse de Marc Cassivi qui corrobore mes opinions sur le génie irrévérencieux de ce film. 
C'est un rendez-vous! Si Satan le veux!


Fantasia 2011, Jour 9: Critique de THE DIVIDE. Huis clos à louer...style nihiliste-chic

Il y a des juxtapositions qui font sourire et qui font froid dans le dos en même temps. À la première Fantasienne de The Divide, le public  était particulièrement survolté. Au tiers constitué d'un groupe qui semblait justement sortir d'un film post-apocalyptique, leurs réactions étaient pour le moins surprenantes, légèrement plus que de coutume à Fantasia. Cet atavisme donnait chaud au cœur : des cris, des commentaires d'une violence surprenante (Pour ma part, kill that bitch! et Suck it Faggot! sont en tête de liste) et une ovation debout pour Michael Biehn (vraiment?).
Le réalisateur Xavier Gens devait être aux anges. D'entrée de jeu, le public était presque une extension naturelle de son  film: bavard et tapageur
 The Divide est un huis clos post-apocalyptique comme vous en avez vu plusieurs. L'idée n'est de renouveler une recette moult fois éprouvée mais d'insuffler une vie nouvelle au sous-genre à grand coup de stéroïdes(comme les personnages qui nous rappellent que les radiations et la faim, ce n'est pas une raison pour perdre ses biceps).

1-Une attaque nucléaire qu'il n'est pas nécessaire de montrer ou d'expliquer.
2-Une bande bigarrée qui se réfugie et se barricade dans le sous-sol de leur immeuble. La mère de famille fragile, les baveux de service, la jeune femme silencieuse, le noir qui en vu d'autre et le pleutre habituel. Le concierge, maître des lieux, un homme au lourd passé avec un sens aiguë de la paranoïa qui sait de quoi il en retourne. 
3-Montrer "graduellement" le niveau de dégénérescence physique et psychologique de notre bande de chouettes copains, jusqu'à les faire sombrer dans l'inévitable sauvagerie. 
 En tentant de renouveler tout ca, Xavier Gens fait des choix particulièrement consternants.

Il parvient à faire oublier au spectateur l'étroitesse des lieux: le sous-soul de l'immeuble est filmé avec une énergie digne d'un Panic Room (la caméra n'en fini plus de passer par des tuyaux et les trous de serrure)
Exit: la claustrophobie. On se croirait parfois dans une relecture de Frontière(s) avec les tics de réalisation de Hitman. L'esthétique de jeu vidéo bien perceptible.

Ensuite, Gens choisi de couvrir le tout d'une trame sonore extrêmement tapageuse qui ne laisse pas deux secondes de répit ni aux spectateurs ni même à ses personnages :effets de violons, orchestrations "déchirantes". On s'attend d'une minute à l'autre à voir un visage pleurer avec Mad World de Gary Jules qui joue à fond. Les personnages passent par ailleurs une bonne partie de leur temps à hurler et s'insulter. Il n'est pas vraiment question ici de montrer une tension psychologique crédible. On veut transformer au plus vite nos personnages en menace
Exit: le silence et la tension. Impossible dans ce contexte d'être affecté par la dégradation mentale des personnages. Heureusement, leur grotesque transformation physique (cheveux qui tombent et yeux cernés) est là pour nous indiquer leur niveau de dégénérescence empirique. La direction d'acteur encourage donc à fond le cabotinage. À ce niveau, le jeu survolté de Milo Ventimiglia, protéiné et homoérotique, est plutôt réjouissant. Le personnage grand guignolesque campé par Michael Eklund est hilarant et inquiétant à la fois. Il lui seul, il finit par sceller notre manque d'implication émotive. 

Que nous reste-t-il devant ce large huis clos gavé de musique où les personnage deviennent des déchets vivants entre deux postillons? Eh bien, il nous reste "le plaisir" de les voir se détruire jusqu'au dernier. Il a beau être racoleur, The Divide assume au moins son coté nihiliste-chic. Dans notre manque absolu d'attachement pour cette brochette de personnages tour à tour clichés et irritants, on veut forcément les voir se faire torturer et s'entretuer, question d'avoir quelque chose à se mettre sous la dent. Difficile dans ces circonstances de reprocher aux macaques à côté de toi de glousser des que quelqu'un se fait trancher la gorge ou arracher un ongle.  Après tout, il ferait probablement de même. 
C'est à ce moment que le huis clos, pour mon plus grand plaisir et mon dégout, est devenu la salle de cinéma. 
J'adore Fantasia.