lundi 20 février 2012

Notre émission du 19 février: JOE LE TAXI? (JOE VS TAXI DRIVER)

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Mon existence de cinéphile compulsif m'aura appris quelque chose de précieux, de vital même, sur la relation qu'entretient l'homme avec la culture: aucune oeuvre, aucun film, même la pire enflure ayant tachée l'écran par sa seule existence, ne gagne pas à être vu une seconde fois. Au risque de me prendre pour Zizek, avec un léger changement de sa parallaxe, un infinitésimale déplacement de ses repères intellectuels, on peut conférer à un navet la saveur d'une fraise (wow je suis en FEU). 

La vie est courte et il faut bien faire des choix. Cependant, si vous partagez le moindrement du monde mon opinion, entendons nous sur le fait que voir à outrance un grand film peut parfois avoir un effet surprenant. 

Prenez dans mon cas TAXI DRIVER, par exemple...
Le film de Scorcese ne fait pas partie a priori de mes films préférés. Pourtant, je l'ai regardé une bonne dizaine de fois, sans trop m'expliquer pourquoi. À toutes les fois où je revois ce film, équipé d'un bagage idéologique fluctuant, je constate que c'est un tout autre film, tour à tour réactionnaire, pathétique, onirique, inspirant. Je ne pense pas que je suis le seul à qui Taxi driver fait cet effet, par ailleurs.


Je suis d'avis que le film a  pincé une corde sensible énorme sur une quantité de sujet et que pour cette raison, les cinéphiles se poseront souvent la même question: Taxi driver à t'il un ancêtre et un successeur? Certes, l'influence du film se fait sentir encore énormément à ce jour. Un exemple à la volée; le Rorschach du Watchmen de Zack Snyder qui, le temps de quelques scènes, devient le Travis Bickle de cette uchronie...

"June 29th: All the animals come out at night - whores, skunk pussies, buggers, queens, fairies, dopers, junkies, sick, venal. Someday a real rain will come and wash all this scum off the streets. I go all over. I take people to the Bronx, Brooklyn, I take 'em to Harlem. I don't care. Don't make no difference to me. Listen, you fuckers, you screwheads. Here is a man who would not take it anymore. A man who stood up against the scum, the cunts, the dogs, the filth, the shit. Here is a man who stood up""Rorschach's Journal. October 12th, 1985:Dog Carcass in alley this morning, tire tread on burst stomach. This city is afraid of me. I have seen its true face. The streets are extended gutters and the gutters are full of blood and when the drains finally scab over, all the vermin will drown. The accumulated filth of all their sex and murder will foam up about their waists and all the whores and politicians will look up and shout 'Save us!' And I'll look down, and whisper 'no"




Cette semaine nous parlons de l'héritage de Taxi driver, des tentatives de lui laisser une succession. Nous le comparons également à son cousin éloigné: JOE de John G.Avildsen. 
Joe est en quelque sorte la genèse de Taxi Driver, un brûlot particulièrement efficace réalisé 6 ans plus tôt qui annonçait la venue d'une nouvelle génération de réalisateurs américains, mais qui exprimait aussi  leur malaise et leur colère, autant pour leur société que pour le cinéma de la génération précédente. Impossible que Schrader et Scorcese ne l'ait pas vu. Même si le film du réalisateur de Rocky est aujourd'hui à peine culte, il eu l'effet d'une bombe idéologique à sa sortie (rappelons aussi que le comédien  Peter Boyle tiens un rôle similaire dans le film de Scorcese)

L'interprétation inoubliable de Peter Boyle changera à jamais sa vie, ne serait-ce que parce qu'il tentera par la suite de ne plus jamais interpréter de personnage semblable. Joe carbure à l'ignorance, la peur, le refoulement et la haine. Un gars normal quoi, tout ce qu'il y a de plus banal. Comme plusieurs de vos voisins.

Que reste t-il de Joe? Le film a t'il encore de la pertinence? Un chose est certaine: en le voyant juxtaposé à Taxi Driver, les deux n'en deviennent que plus pertinents. 

dimanche 12 février 2012

Notre émission du 12 février: Brian Yuzna et son SOCIETY (1989)-un soap opera grand-guignolesque contre les dangers de la conformité

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Après une trop longue période d'absence, le 7ème revient enfin poser ses pénates hebdomadaires juste pour vous les aminches!

Votre émission préférée sera désormais un rendez-vous dominical; nous serons avec vous à partir de 11 heure à tous les dimanches. C'est approprié quand on y pense non? Nous serons officiellement, canoniquement même, une célébration religieuse. Nos voies sont cependant plus pénétrables que celles du père. Mais bref...

Cette semaine, parce qu'il était temps que nous le fassions, une émission toute fraîche sur un des plus ardents artisans du bis, Brian "The Brain" Yuzna. On ne trouve plus beaucoup des cinéastes comme lui et c'est une chose qui doit se célébrer. Producteur, réalisateur, scénariste, capable du pire et de l'encore pire, on lui doit des moments de bravoure avec des rottweilers cyrbernétiques, des dentistes psychopathes, des zombies libidineux, des fiancées pourrissantes, une abyssale adaptation de comic et une poignées de petits moments d'horreur juste assez piqués des vers. 

Mais on lui doit aussi SOCIETY, son tout premier film. 

Et ça, c'est une autre paire de manche. C'est de cette surprise de taille que vous parlera le 7ème en particulier cette semaine...

Dans un Berverly Hills tout ce qu'il y a de plus cossu des années 90, Bill, un jeune homme à qui tout réussi se prépare à une digne avenir de bourgeois. Ses parents sont riches et impeccables, sa majorette de copine est belle et bien blonde. Il est le capitaine de l'équipe de foot et le président du conseil étudiant. Ça n'empêche cependant pas Bill d'être traversé d'angoisse sur le sens de sa vie et de consulter régulièrement un psy. Et si l'existence  n'était pas ce qu'elle parait? Si la conformité était si chouette et simple que son entourage se tue à lui expliquer, pourquoi Bill est t-il constamment dérangé par des visions grotesques de ses proches? En sombrant dans la folie, Bill se rapproche d'une vérité qu'il aurait été préférable de ne pas connaître mais qui était aussi inéluctable...

Tout dans SOCIETY est directement sortie d'un soap opera: la réalisation, la musique, l'interprétation des acteurs, dont plusieurs proviennent directement de ce milieu.  Un vrai coup de génie: volontairement ou non, en utilisant une ambiance de soap opera pour parler de l'angoisse de la conformité, Yuzna parvient à déconstruire le genre et à lui conférer des inflexions grotesques. On est dans le terrain voisin et lointain des meilleurs Lynch, qui s'est souvent prêté à cet exercice où il est question de révéler le caractère profondément inquiétant de cette réalité fabriquée, pourtant si proche de la notre. On est aussi à quelques bornes des premiers Cronenberg, où les angoisses de la conformités peuvent s'incarner dans la chair et faire subir de bien outrageuses triturations au corps. 

Sous ses accents grand-guignolesques, SOCIETY cache bien son jeu. Il est bien au delà du simple film d'horreur psychotronique. Le premier film de Yuzna est une charge subversive contre la bourgeoisie américaine ordinaire. What's not to love? 

http://www.youtube.com/watch?v=sEzMMJSkEHE